Dans les souvenirs, il y a il me semble beaucoup de lieux. Rarement des visages. C'est pour cette raison qu'on a du mal à se rappeler avec force détails, les contours du visage d'un proche depuis longtemps disparu.
On pense parfois se rappeler un moment précis, très loin dans notre enfance, puis on réalise qu'il ne s'agit pas d'un souvenir réel mais seulement d'une photographie revue souvent depuis que le fait s'est produit, donnant ainsi uniquement l'illusion de la mémorisation.
L'adage dit que les paroles s'en vont mais que les écrits restent. On oublie de dire que les écrits restent un peu plus longtemps mais guère plus. Qui lit Hésiode aujourd'hui ? Quelques agrégés d'histoire ? Une personne sur cent mille ? Pas moi.
D'après la science, dans la chimie de notre cerveau, ce sont les odeurs dont notre mémoire garde le plus longtemps le souvenir. Ça parait absurde de prime abord, mais j ai posé la question autour de moi et c'est vrai que les réactions sont rapides et toujours très précises, qu'elles entrainent foule de détails innatendus :
Une odeur de tabac froid mêlé à celle des draps propres dans la chambre d'une mère un peu bourgeoise.
Des vapeurs de graisse, de marijuana et d'encens dans une commune à Shawinigan.
Un parfum de Fabergé et l'odeur de vieux livres trop hauts sur des étagères dans un bureau sombre et interdit.
De l'herbe humide et la peau de l'autre dans une colonie de vacance.
Une cave en lorraine où on a peur d'aller qui sent le charbon et les outils rouillés.
L'odeur de sang et de vieux pavés d'une boucherie familiale en Normandie.
La glace du saint Laurent et les gifles du vent, lorsqu'on rentre chez soi de l'autre côté du pont et qu'il n'y a pas d'autobus.

2 commentaires:
çà sent la"madeleine de Proust" tout çà!
Je n'ai pas le souvenir d'une odeur particulière. Dommage... Très beau texte...
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