Peut-être qu'avant, dans le quartier anglophone et bourgeois d'Outremont, où tout était propre et bien lisse, où tous les propriétaires au printemps plantaient le même dimanche les mêmes fleurs achetées au même endroit, où le seul spectacle un peu hors du commun et de l'ennui était la veille de shabbat des juifs hassidim le vendredi soir, je n'étais pas réellement arrivé au Québec. Ou peut-être qu'en changeant de quartier, j'ai fait un voyage dans le temps, vers le Montréal des années 50 ou 60, celui des romans de Michel Tremblay, celui d'avant les jeux et d'avant la révolution tranquille. Ville-Marie est l'arrondissement du " Downtown " de ma nouvelle ville. Le quartier des affaires et des grosses limousines, des touristes français qui se promènent dans le Vieux Montréal, le long du vieux port, quartier aussi des festivals, des grosses compagnies à gratte-ciels : Qébecor, Hydroquébec, Axa et Bell Canada. Mais ma rue se trouve un plus loin vers l'Est de l'île, au pied du pont Jacques Cartier qui enjambe le Saint Laurent vers la rive Sud et qui ressemble étrangement au pont de Brooklyn avec en guise de cerises sur le gâteau, de petites tour Eiffel posées en haut de ses énormes pylônes d'acier. Mon nouveau quartier est connu de tous les montréalais du nom de Centre-Sud. Il n'a pas très bonne réputation, car c'est là que se sont toujours trouvés les désaxés, les prostitués et les marginaux. C'est là aussi que de grosses usines lâchent leur fumée épaisse et que les ouvriers, depuis le XIXe, ont toujours habités. Dans ma ruelle, derrière notre immeuble, des chats se battent pour une femelle, deux enfants aux genoux sales joue au Hockey sur le goudron cabossé, une dame étend son linge en tirant sur la poulie qui fait tourner la corde accrochée sur les immeubles d'en face. On voit, un peu plus loin sur la droite, un jeune homme qui répare sa voiture, son autoradio distribue les notes de la guitare électrique de Van Halen à tout le quartier. Les odeurs de nourriture se mêlent. J'aime ce quartier où les gens se parlent et où la voisine nous a souhaité la bienvenue.
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