mercredi 18 février 2009

Là où le le dimanche il n'y a personne et où l'été l'asphalte fond


(GAUCIEL)
Nous faisons une boule de neige un matin d’hiver, toute petite au départ devant le grillage de la maison, impossible à faire rouler jusqu’à l’école car elle devient bien trop grosse.
Une énorme sphère de métal : la base militaire 105 ou 107, je ne sais plus, qu’on ne peut pas approcher avec ses gros panneaux « Danger » et sa piste pour les avions, mais qu’on voit comme un monde inconnu, presqu’extra-terrestre.
Deux petits vélos aux pneus blancs : un noir J’en suis sûr, avec mon frère Stéphane dessus qui fait des Zigzags sur la route derrière chez nous pas loin de la base où on n’a pas le droit d’aller ; l’autre, le même exactement, un peu rouillé pareil, mais d’une couleur différente, vert peut-être. Moi dessus, pas rassuré.
La peur de tout : de la toile d’araignée, en haut à gauche de la porte des toilettes ; du vide de la maison lorsque la porte de la chambre n’est pas fermée la nuit.
L’odeur du carrelage. Mimine, la chatte « sauvage » arrivée chez nous toutes griffes dehors un matin d’automne dans les bras de papa.
Des bouteilles de gaz, le bois ciré dans la cuisine. Une terrasse derrière le garage et des fauteuils transats vert et blanc dans l’herbe haute qu'il ne faut pas abîmer. Une table de ping-pong qu’on ne peut pas utiliser car elle n’est pas à nous. Le sentiment même à cinq ans de n’être pas chez nous mais chez Tata.
Tata et tonton qui sentent la viande mais qui ont des dents tellement blanches. Une ballade avec maman un mercredi de juin, jusqu’au village d’à côté. Il fait très chaud, l’asphalte fond. On apprend des chansons. Maman est plus belle et plus grande que le soleil, c'est moi qui lui tiens la main. Du maïs cueillit dans un champ pour le faire cuire.
Les amies des cousines de mon père : Céline, Géraldine et surtout Cécile, ses belles boucles blondes très courtes et ses lunettes rondes. La cour d’école un peu floue mais les porte-manteaux très nets. La route nationale à traverser, grande comme une autoroute. Une marre sur la droite avec des têtards et des barrières blanches en bois, peut être des chevaux.
Maintenant je sais faire mes lacets, je suis fier parce que mon frère ne sait pas et qu’il est plus âgé. J’entends, depuis la table de la salle à manger, parler de l’accord du participe passé avec le verbe être, mais ça, mon grand frère le comprend et pas moi.
Une petite forêt où on a trouvé Mimine, à côté de la maison, avec une vieille épave de voiture rouillée et des ronces impossibles à traverser, nous sommes des aventuriers. Une herbe de la Pampa dans le jardin, devant les portes vitrées.
L’enterrement de pépère Bazin, où mon père se rend, accompagné de mon grand frère, dont je suis jaloux car il y a mangé de la brioche. C’est mon premier contact avec la mort et j’envie juste mon frère. Je crois même me souvenir d’avoir dit à ma mère : « ce sera moi qui irait avec papa à l’enterrement de mémère ». Une Citroën G.S. et de l’autre côté de la rue, les mêmes maisons neuves aux volets de bois bruns. Tout autour du village, du blé à perte de vue.

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