jeudi 26 février 2009

Alfa rococo

Puis sur ma lancée, Alfa rococo. Pour faire le tour de mes chansons de l'hiver...


Dumas : " J'erre "

Je fais comme dit Dumas dans sa chanson. exactement comme ça, à part que j'ai mon chien en laisse. Dumas, c'est très bon... et en plus il est beau.

Des yeux D'Aurore et de Sarah




Pendant ces deux derniers mois des yeux se sont fermés pour toujours. J'ai décidé de parler de ces yeux.

Les yeux les plus jeunes avaient 19 ans, les autres en avaient 89. 70 années d'écart. Toute une histoire, un monde, un océan aussi.

Les yeux les plus jeunes avaient l'éclat de l'été, l'arrogance qu'on sait être de la fragilité.

Les plus âgés étaient brillants d'humour. De cet éclat là, on apprend que la vie est belle, qu'il suffit seulement de se mettre bien droit, juste devant-elle.

Ces deux paires d'yeux ont toutes les couleurs, on y a vu du bleu, du gris, du marron, du noir, du vert et aussi du jaune et du violet.

Les yeux les plus jeunes étaient tellement perçants, que parfois, vous aviez l'impression d'être transparent.

Les yeux les plus âgés avaient traversé des frontières, des guerres, des langues et des lois mais ils s'émerveillaient encore que la neige soit si blanche et les sapins si verts.

Les yeux les plus jeunes voulaient croquer la vie.

Les yeux les plus âgés ne s'étaient jamais laissés croquer par elle.

Dans les yeux les plus jeunes, il y avait du feu.

Dans les yeux les plus âgés, il y avait une source.

Les yeux les plus jeunes étaient des miroirs.

Les yeux les plus âgés étaient des phares.

La dernière fois que j'ai vu les yeux les plus jeunes c'était il y a deux ans. Avec le recul, il me semble que les paupières étaient lourdes, que ces yeux devaient pleurer souvent.

La dernière fois que j'ai vu les yeux les plus âgés c'était vendredi. Les pupilles s'étaient rétrécies comme un rideau de théâtre que l'on refermerait doucement.

Hasta luego


mercredi 18 février 2009

Là où il pleut des disques de Renaud




(ÉVREUX)
Nous sommes à nouveau dans une ville, je sais que sous les immeubles il y a des caves et qu’il ne faut pas y aller, des choses interdites s’y passent, mais je ne sais pas quoi. Notre immeuble est composé d’un ensemble de bâtiments formant un quadrilatère presque fermé. Nous habitons sur le côté le plus petit, près duquel se trouve l’accès au terre-plein central. Notre appartement est au premier étage de la première entrée, notre voisine s’appelle madame Douilly et souvent elle fait des gâteaux, surtout des tartes. Mimine est perdue en ville et on la retrouve souvent sur le balcon de Madame Douilly. Derrière nous, de l’autre côté de la rue il y a une piste de skate-board en goudron rouge. Une fois je m’y suis ouvert la tête sous un petit pont qui sent l’urine. L’autre côté des bâtiments est un monde inconnu.
J’ai une meilleure amie, elle s’appelle Agnès Mallet et son surnom est Tigresse. Elle a un arbre magique. Sa mère a des cheveux courts. Sur le terre-plein il y a une « cage à écureuil » bleue, nous y jouons souvent et grimpons sur ses barres de métal. Il y a aussi un bac à sable, mais nous y jouons peu car il y a des crottes de chien. Mon grand frère a une planche à roulettes

Il me semble que ma maîtresse est blonde, qu’elle a une voiture de sport qu’on appelle une Bagherra. Au bout de la cour de L’école il y a un talus, où souvent on court et on tombe. Dans la classe il y a des cubes de couleurs différentes et des cerceaux, des mots sont découpés puis affichés aux murs. Les élèves prennent des photos, en groupe puis un par un. Ensuite ils attendent leurs parents devant une grille. Mes frères ne sont pas dans ma classe. Une fois, un samedi midi papa vient nous chercher avec une nouvelle voiture c’est une Simca 1100, puis on roule jusqu'à ses amis qui habitent dans une caravane.
Avec mon frère, un jour, nous nous engageons dans le monde inconnu, nous marchons et marchons encore à travers la ville, plus loin au-delà du centre commercial. J’ai l’impression que celle-ci ne finit jamais. Nous arrivons enfin à une aire de jeu, dont d’autres gamins de l’école nous avaient parlé. C’est fantastique, les toboggans sont énormes, les tourniquets vont à une vitesse folle, il y a mêmes des circuits de cordages où je n’ose pas aller. Il doit être presque sept heures du soir, nous voyons tout à coup arriver papa comme une furie, il nous a cherché partout.
Le mercredi nous sommes inscrits à des activités de quartier. Une fois, j’ai été maquillé en chat. Dans le quadrilatère, c’est la tradition qu’un jeune qui quitte ses parents jette tous ses jouets par la fenêtre. Je me rappelle d’une fille qui l’avait fait en face de chez nous. Mon frère avait attrapé un disque de Renaud, c’était Noël en juillet et des cadeaux tombaient du ciel.
Un jour J’ai vu Rémi Brica, l’homme orchestre, Au centre commercial. On y achetait 1 franc de bonbons qui remplissaient de gros sachets pour l’après-midi, on descendait en courant les escaliers de l’immeuble, une pièce de deux francs à la main, quand on entendait la sonnerie du marchand de glace. Parfois il y avait le bibliobus. Mon père une fois a cassé la gueule d’un voisin.

Ce qui se passe après l’enfance, après nos six ou sept ans n’a, à mon sens, aucune importance.

Mais les souvenirs sont comme des photographies, la plupart du temps, comme elles ils jaunissent et souvent on ne sait même plus quand ni où on les a pris.

Là où le le dimanche il n'y a personne et où l'été l'asphalte fond


(GAUCIEL)
Nous faisons une boule de neige un matin d’hiver, toute petite au départ devant le grillage de la maison, impossible à faire rouler jusqu’à l’école car elle devient bien trop grosse.
Une énorme sphère de métal : la base militaire 105 ou 107, je ne sais plus, qu’on ne peut pas approcher avec ses gros panneaux « Danger » et sa piste pour les avions, mais qu’on voit comme un monde inconnu, presqu’extra-terrestre.
Deux petits vélos aux pneus blancs : un noir J’en suis sûr, avec mon frère Stéphane dessus qui fait des Zigzags sur la route derrière chez nous pas loin de la base où on n’a pas le droit d’aller ; l’autre, le même exactement, un peu rouillé pareil, mais d’une couleur différente, vert peut-être. Moi dessus, pas rassuré.
La peur de tout : de la toile d’araignée, en haut à gauche de la porte des toilettes ; du vide de la maison lorsque la porte de la chambre n’est pas fermée la nuit.
L’odeur du carrelage. Mimine, la chatte « sauvage » arrivée chez nous toutes griffes dehors un matin d’automne dans les bras de papa.
Des bouteilles de gaz, le bois ciré dans la cuisine. Une terrasse derrière le garage et des fauteuils transats vert et blanc dans l’herbe haute qu'il ne faut pas abîmer. Une table de ping-pong qu’on ne peut pas utiliser car elle n’est pas à nous. Le sentiment même à cinq ans de n’être pas chez nous mais chez Tata.
Tata et tonton qui sentent la viande mais qui ont des dents tellement blanches. Une ballade avec maman un mercredi de juin, jusqu’au village d’à côté. Il fait très chaud, l’asphalte fond. On apprend des chansons. Maman est plus belle et plus grande que le soleil, c'est moi qui lui tiens la main. Du maïs cueillit dans un champ pour le faire cuire.
Les amies des cousines de mon père : Céline, Géraldine et surtout Cécile, ses belles boucles blondes très courtes et ses lunettes rondes. La cour d’école un peu floue mais les porte-manteaux très nets. La route nationale à traverser, grande comme une autoroute. Une marre sur la droite avec des têtards et des barrières blanches en bois, peut être des chevaux.
Maintenant je sais faire mes lacets, je suis fier parce que mon frère ne sait pas et qu’il est plus âgé. J’entends, depuis la table de la salle à manger, parler de l’accord du participe passé avec le verbe être, mais ça, mon grand frère le comprend et pas moi.
Une petite forêt où on a trouvé Mimine, à côté de la maison, avec une vieille épave de voiture rouillée et des ronces impossibles à traverser, nous sommes des aventuriers. Une herbe de la Pampa dans le jardin, devant les portes vitrées.
L’enterrement de pépère Bazin, où mon père se rend, accompagné de mon grand frère, dont je suis jaloux car il y a mangé de la brioche. C’est mon premier contact avec la mort et j’envie juste mon frère. Je crois même me souvenir d’avoir dit à ma mère : « ce sera moi qui irait avec papa à l’enterrement de mémère ». Une Citroën G.S. et de l’autre côté de la rue, les mêmes maisons neuves aux volets de bois bruns. Tout autour du village, du blé à perte de vue.

Là où les tours penchent et où des lapins existent peut-être


(METZ)
Lorsqu’on regarde vers le haut, par la fenêtre de l’appartement, il semble que la tour va tomber. Nous sommes au quatorzième étage et on peut presque toucher les nuages. Je n’aime pas que maman nettoie les vitres car elle pourrait tomber. Je n’aime pas non plus l’ascenseur, on a du mal à y faire rentrer la poussette de mon petit frère.
Mes grands frères sont allés à une fête d’anniversaire, je les envie. Papa travaille à Moscou. Maman m’a fait croire qu’il y avait un lapin au loin en me faisant regarder au travers de jumelles, alors je lui ai fait croire que je le voyais aussi. Souvent je me colle à elle, surtout le soir.
Parfois nous allons chez mamie et papy, c’est très loin. Un jour, nous ne pouvons pas y aller car nous avons la varicelle. Chez mamie il faut mettre des patins. Pour écouter la télévision, papy ferme une porte de plastic en forme d’accordéon. Il y a des chats vivants et un chien empaillé dont les yeux ressemblent à des billes.
Je suis resté enfermé dans la salle de bain car la porte était bloquée. La ville que nous habitons s’appelle Metz-Borny. Il y a un aquarium dans le salon. Mon petit frère a un lit en forme de baignoire et nous plaçons des autocollants dessus, je crois que ce lit est rose. Il ne reconnait pas papa quand il rentre de Russie avec une barbe.
C’est tout.
Il me semble que le voisin du dessous est souvent énervé. Il s’appelle…
Non, c’est tout.